L’origine de l’oubli – Anaïs Jeanneret
Mila, scénariste, perd son mari Simon, producteur de cinéma, qui a négligé sa santé. Sa vie s’en trouve brutalement anéantie par le chagrin et la disparition de l’être aimé avec qui elle partageait tout depuis 10 ans. Ce deuil qui la submerge réveille en elle les souvenirs douloureux de son enfance ; Trente ans auparavant, elle a déjà perdu son père et s’est cachée sous un masque d’ignorance et de fausse indifférence auquel l’a condamnée le silence de sa mère sur ce suicide.
Mila se raccroche désespérément à sa routine de vie avec Zoé, sa fille de 5 ans, dont l’innocence enfantine et la faculté d’adaptation à l’absence du père l’obligent à sortir malgré elle de sa léthargie. Son cerveau se dissocie de son corps. Elle s’aveugle et se perd dans de brèves étreintes amoureuses avec des inconnus, essayant en vain d’anesthésier sa douleur. Elle poursuit sa vie comme une somnambule dont la mémoire se dissout et se détache progressivement de la réalité.
Peu à peu, grâce à l’affection de sa tante, à ses retrouvailles avec l’ami d’adolescence, à des rapprochements avec les amis proches et sincères, Mila va cependant retrouver la force de remonter la pente. Elle renonce à sombrer et apprend à dompter ses souvenirs. C’est aussi par l’écriture, formidable exutoire grâce aux mots qui jaillissent irrépressiblement, et par le projet d’un nouveau scénario et de son premier film qu’elle pourra peut-être échapper à la culpabilité d’être toujours vivante et à l’oubli d’elle-même.
Dans ce récit, aussi tragique soit-il, l’autrice nous raconte, d’une plume sensible et d’une grande finesse, la douleur face au deuil d’un être cher, le manque terrible qui anesthésie tout et déséquilibre la vie. Mais, elle nous montre également le chemin vers la résilience. Il n’est pas question d’oublier celui qui a disparu, mais d’apprivoiser son souvenir et de réapprendre la vie avec cette absence. C’est la recherche d’un sursaut et d’un élan de vie, l’acceptation du chagrin et de la blessure qui donnent à ce roman toute sa force et son émotion.
Une lecture qui nous laisse entrevoir les mécanismes de survie à l’impensable et peut donner de l’espoir à toutes les personnes victimes de terribles accidents sur le parcours parfois chaotique de la vie. Je remercie les Éditions Stock et Netgalley France de m’avoir permis de découvrir l’autrice que je ne connaissais qu’à travers sa carrière d’actrice malgré les 8 romans déjà à son actif. La connaissez-vous ? Avez-vous d’autres livres à conseiller sur la thématique du deuil ?
👉 Poursuivez votre lecture avec ma précédente chronique : Klara et le soleil de Kazuo Ishiguro.
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